Témoignage de cartel : sur le fil de la non interprétation
Témoignage de cartel : sur le fil de la non interprétation
Mon désir de faire Cartel se soutient de deux choses : me « cogner » aux textes et un questionnement (très large) sur la clinique auprès des enfants. Ainsi nous nous sommes lancés dans la lecture du séminaire IV : La relation d’objet.
La lecture en cartel permet d’aborder mon premier point, pas seule, et ce dans la discussion de ce que chacun entend, croit saisir, ne comprend pas, voire reste complètement énigmatique. Ces discussions me permettent de prendre appui sur de la clinique ou des faits d’actualité politique, sociétale…
Le deuxième point, la clinique auprès des enfants, je ne l’ai toujours pas précisé. Quelques fulgurances ont émergé, comme celle à la lecture de ce que j’ai entendu qu’on n’interprète pas chez un tout-petit : on n’interprète pas avant que le symbolique soit entré dans le monde du sujet, ou que le sujet y ait fait son entrée. En l’occurrence travaillant uniquement avec les moins de 3 ans, voilà déjà un sacré repère « C’est uniquement à partir de l’entrée du sujet dans un ordre qui pré existe à tout ce qui lui arrive (…) que tout ce par quoi il aborde son expérience (…) s’ordonne, s’articule, prend son sens, et peut être analysé » [i]. Cela semble d’une logique à tout épreuve et cela fait partie des choses à partir desquelles on réagit « bon sang mais c’est bien sûr ! ».
Ma question n’a pas encore trouvé à s’élaborer. Néanmoins pour avoir été marquée par ces quelques lignes, je me dis qu’il doit s’agir de quelque chose du côté de la position de l’analyste auprès de l’enfant. Comment intervient-il ? Pour quoi ? Pour qui[ii] ? Dans les discussions (et non pas dans la lecture seule) c’est étrangement toujours un même enfant qui revient m’éclairer cliniquement quant aux concepts que Lacan déplie sous nos yeux et nos oreilles parfois torturés. C’est ce que cet enfant amène en séance qui vient me percuter dans l’après-coup de la lecture ou de l’écoute, puisque nous faisons une lecture à voix haute. Et ce, qu’il s’agisse dans ce séminaire du rapport à l’objet manquant, de la construction psychique de la frustration et son amorce du symbolique ou encore de la théorie du signifiant qui surgit çà et là dans le texte.
A noter que la rencontre avec cet enfant s’est initiée en cours de cartel. Deux questions se dessinent donc là pour moi, deux voies. A moins qu’un nouage vienne opérer.
Amandine Lévy
[i] Lacan J., Séminaire livre IV, La relation d’objet, Paris, Ed. Seuil, p. 102.
[ii] Notamment dans l’accueil des enfants avec leur parent dont la présence est parfois nécessaire et demandée par l’enfant.